Guillaume Tavard est né en 1977. Il vit à Paris et participe à la revue littéraire Décapage. Après Le Petit Grain de café argenté (le Dilettante, 2003), Loin d’être malheureux est son deuxième livre.
Il y a des jours où rien ne se passe comme on le souhaiterait. L’existence semble soumise à un « avis de grand frais » avec vent du Nord par rafales. Le temps se met au gris, les sentiments aussi. Les amours elles-mêmes semblent se perdre dans une brume. Elles s'évaporent. Mais quand l'orage éclate pour de bon, c'est pire : les amours les plus solides fichent le camp pour de bon.
Dieu sait pourtant qu'on croyait aux serments, aux "toujours", aux fidélités. Et puis c'est fini. Alors on tâche de comprendre, et surtout de rester digne. C'est-à-dire d'agir comme si on saisissait au moins un peu le sens de ce qui se passe. On en parle à ses amis, on quête leur soutien. Ils n’écoutent pas, ou mal. On se retrouve seul. Il ne reste plus qu’à se cacher derrière les mots. Ce sont parfois de bons mots. On cultive donc la réplique : on fait semblant de ne pas s'effondrer. La position est délicate à tenir. Raison de plus pour en sourire.
C’est sur cet équilibre entre chagrin et dérision que repose le recueil Loin d’être malheureux. Cette posture est propre sans doute au genre de la nouvelle, qui apprécie le doux-amer, le double-sens, le sous-entendu, l'air de rien et la douleur irrémédiable. Encore faut-il tenir la note de cette chanson-là sur tout un recueil. Guillaume Tavard se tire avec habileté de ce défi d'écriture en aiguisant ses dialogues et en laissant ses textes s’achever sur une note suspendue et navrée, en musicien de l’écriture.
Jean-Noël Blanc (membre du jury)
Photo © Heloise Jouanard