LES PRINCIPAUX CHIFFRES1
Le secteur du livre est la première industrie culturelle en France. Le marché du livre représente près de 4,5 milliards d’euros. À titre de comparaison, le marché de la musique enregistrée est estimé à moins de 1 milliard d’euros et celui du cinéma (billetterie et ventes de DVD) à près de 2 milliards d’euros.
Le secteur de la production et de la diffusion du livre représente, au sens large (édition, diffusion, distribution, commerce de détail et bibliothèques), plus de 80 000 emplois, dont environ 13 000 dans la branche de l’édition et 10 000 dans celle de la vente de livres au détail, auxquels il convient d’ajouter les 101 600 auteurs de livres qui sont à l’origine de cette filière.
Le secteur du livre est une industrie de nouveautés, dont l’économie est basée sur une logique de péréquation entre succès commerciaux et moindres réussites. Cette démarche favorable à la création littéraire incite les éditeurs de livres à multiplier les nouveautés pour augmenter leurs chances de succès. L’équilibre nécessaire entre diversité et surproduction devient de fait de plus en plus fragile.
Le secteur de l’édition a ainsi produit, en 2018, 67 942 nouveautés et nouvelles réimpressions (soit 190 nouveautés par jour !), ce qui porte le nombre de références disponibles à 783 000 en version imprimée (+1 % par rapport à 2017) et à 281 000 en version numérique (+13 %).
Cette hausse de la production éditoriale s’accompagne d’une forte diminution du tirage moyen par titre : en 2017, le tirage moyen s’établit à 4 994 ex./titre, soit une baisse de 6,5 % par rapport à 2016.
En 2017, 430 millions d’exemplaires (livres imprimés, numériques et audio) ont été vendus, générant pour le secteur de l’édition un chiffre d’affaires (CA) de 2,754 milliards d’euros (prix de cession éditeur), dont 201,7 millions d’euros pour les livres numériques et audio.
Malgré la grande diversité de l’offre disponible, on observe une tendance à la concentration des ventes sur un nombre réduit de titres : ainsi le secteur de l’édition réalise 48 % de son chiffre d’affaires grâce aux seuls 10 000 titres les plus vendus et 20,8 % de son chiffre d’affaires avec les 1 000 titres les plus vendus. Ce phénomène de concentration demeure toutefois nettement moins marqué dans le secteur du livre que dans d’autres industries culturelles.
Il existe par ailleurs une forte disparité dans l’évolution du marché selon les secteurs éditoriaux.
Le secteur de la littérature générale (roman, nouvelle, poésie, théâtre…) conserve une place importante, tant au sein de la production éditoriale (24,3 % des exemplaires produits), que de sa commercialisation (26 % des exemplaires vendus), et enregistre une croissance qui mérite d’être soulignée (+2,7 % de CA en 2017) dans un marché global stable au cours des dernières années.
Les secteurs du livre jeunesse et de la bande dessinée sont ceux qui, au cours des vingt dernières années, ont connu les plus fortes progressions.
Si le secteur du livre jeunesse a vu son chiffre d’affaires (340 M€ en 2017) progresser de 67,5 % depuis 2000, l’évolution du nombre de titres publiés dans ce secteur a cependant augmenté plus rapidement encore (+103 %), ce qui se traduit dans les faits par un CA/titre qui décroît et donc une rémunération des auteurs en baisse, sans compter que les taux des droits appliqués dans ce secteur demeurent généralement faibles (8 % en moyenne) et le plus souvent partagés entre l’auteur et l’illustrateur. Une étude consacrée à la filière du livre jeunesse sera réalisée en 2019 par le ministère de la Culture et le Centre national du livre (CNL), en lien avec la Société des gens de lettres (SGDL), le Syndicat national de l’édition (SNE) et le Syndicat de la librairie française (SLF), et devrait permettre de mieux appréhender la réalité du déséquilibre en matière de partage de la valeur dans ce secteur éditorial qui réalise à lui seul 12,8 % du CA de l’édition.
Le secteur de la bande dessinée a également connu une forte progression, la production éditoriale ayant augmenté de 400 % en vingt ans (9 606 titres publiés en 2017) et le chiffre d’affaires de ce secteur ayant enregistré une hausse de 206 % sur la même période (dont +13 % en 2017). Il représente aujourd’hui 10,5 % du CA global de l’édition.
Le secteur des sciences humaines et sociales se caractérise par cette particularité qu’il conserve une part importante au sein du chiffre d’affaires de l’édition (14 % en 2017), alors qu’il ne représente que 3 % des exemplaires produits et 4,6 % des exemplaires vendus.
Le secteur de l’édition scolaire tient lui aussi une place importante dans l’économie du livre, avec 14,2 % de part de marché (378 M€ en 2017).
On observe également que les ouvrages en format de poche occupent une place croissante au sein de la production, bien qu’à proportion ils contribuent dans une bien moindre mesure au chiffre d’affaires du sec- teur : en 2017, le poche représente 25 % de la production éditoriale et 27,1 % des ventes de livres, mais seulement 14,3 % du chiffre d’affaires de l’édition (soit 379,50 M€).
Le secteur de la traduction contribue également au maintien des équilibres : en 2017, les éditeurs français ont réalisé 13 452 cessions de droits pour des traductions en langue étrangère, soit 8 % de plus qu’en 2016, ces cessions ayant contribué à hauteur de 138 M€ au chiffre d’affaires global de l’édition (+4,4 %). Dans le même temps, ils ont acquis les droits de traduction de 12 591 titres étrangers, qui représentent 18,5 % de la production éditoriale française.
L’anglais (59,3 % des titres traduits en français en 2018, en progression de 0,8 %) demeure la langue la plus traduite dans l’édition française, suivi de très loin par le japonais (12,6 %), l’allemand (5,9 %), l’italien (4,5 %), l’espagnol (3,2 %) et le russe (1,9 %).
Le prix de vente des livres continue, quant à lui, à progresser nettement moins vite (+0,5 % en 2017) que l’indice moyen des prix des biens de consommation (+1,8 %).
Dans ce contexte de stabilité du prix de vente des livres, la hausse de la production éditoriale, conjuguée à une baisse des tirages moyens, conduit à un chiffre d’affaires réalisé par titre en baisse et donc à une diminution proportionnelle des droits versés aux auteurs, dont la situation économique tend à se dégrader.
LES AUTEURS
Le métier d’auteur recouvre des situations extrêmement diverses, tant du point de vue du montant des revenus tirés de l’activité d’écriture que de la part que ces derniers représentent sur l’ensemble des revenus d’un auteur. Par ailleurs, le temps qui y est consacré et le caractère occasionnel ou régulier sont propres à chacun.
L’étude « La situation économique et sociale des auteurs du livre », réalisée en 2015 par le ministère de la Culture (service du Livre et de la Lecture) et le Centre national du livre, avec la participation de la Société des gens de lettres, a permis, pour la première fois, de préciser la cartographie des auteurs de livres en France.
On estime à 101 600 le nombre d’auteurs de livres. Pour autant, seuls 5 000 d’entre eux sont affiliés à l’AGESSA, c’est-à-dire qu’ils ont perçu des revenus supérieurs au seuil d’affiliation de l’AGESSA et effectué une démarche d’affiliation auprès de cet organisme. On estime également à 7 000 le nombre d’auteurs qui, bien qu’ayant perçu des revenus supérieurs au seuil d’affiliation, n’ont pas fait cette démarche d’affiliation.
Selon cette étude, les auteurs de textes (hors traducteurs, illustrateurs et dessinateurs selon la terminologie de l’enquête) représentent 85 % de l’ensemble des auteurs. Sur la population des affiliés, la répartition est très différente : les auteurs de textes représentent 40 %, les traducteurs 24 %, les illustrateurs 17 %, les dessinateurs de bandes dessinées 14 %. Sur l’ensemble de la population des auteurs, c’est le secteur de la non-fiction qui prédomine (60 %) ; chez les seuls auteurs affiliés, c’est au contraire la fiction (70 %).
À la question récurrente de savoir combien d’auteurs peuvent vivre de leur activité, les résultats de cette étude montrent qu’un peu plus de 8 000 auteurs de livres ont perçu, en 2013, des revenus d’auteur supérieurs au SMIC (13 445 €/an), dont près de 3 000 des revenus supérieurs à 2 fois le SMIC (26 890 €) et parmi eux 1 600 auteurs des revenus supérieurs à 3 fois le SMIC (40 335 €). Autrement dit, 90 % des auteurs perçoivent un revenu en droits d’auteur inférieur au SMIC (40 % chez les auteurs affiliés). Ce qui explique que les deux tiers des auteurs exercent une autre activité professionnelle (un tiers pour les affiliés).
S’agissant des droits d’auteur, le plus souvent compris entre 8 % et 10 % du prix public de vente hors taxes du livre, le SNE indique, pour 2017, un montant total de droits versés de 476,20 M€, mais ce montant regroupe les droits versés aux auteurs et aux ayants droit, ainsi que les achats de droits sur des titres étrangers ou sur d’autres secteurs (iconographie, couvertures…). Rapporté au chiffre d’affaires du secteur du livre, ce montant confirme l’estimation selon laquelle un auteur de livres perçoit en moyenne 1 € par exemplaire vendu !
Il ressort par ailleurs des résultats des études une baisse du revenu de l’ensemble des auteurs sur la période récente, particulièrement depuis 2007, et un effet générationnel important : les générations d’auteurs plus récentes ont de moindres perspectives de progression de leur revenu d’auteur que les générations antérieures.
LES ÉDITEURS
En 2017, les éditeurs ont réalisé un chiffre d’affaires de 2,792 milliards d’euros, dont 2,654 milliards d’euros par la vente de livres (valorisée au prix de cession) et 138 millions d’euros en cessions de droits (traductions en langue étrangère, format poche, adaptation audiovisuelle, etc.).
Le chiffre d’affaires réalisé à l’exportation était de 667 millions d’euros.
Le secteur de l’édition se caractérise par une forte concentration, les deux premiers groupes totalisant environ 35 % des ventes de livres et les douze premiers éditeurs, près de 80 %.
On dénombre toutefois près de 3 000 structures éditoriales, dont 1 000 pour lesquelles l’édition constitue l’activité principale et 400 dont l’activité est véritablement significative sur le plan économique.
La diffusion
La diffusion du livre regroupe l’ensemble des opérations destinées à faire connaître les ouvrages auprès des libraires et, plus généralement, auprès de l’ensemble des revendeurs. Elle s’appuie sur une force de vente constituée d’un ou de plusieurs représentants. La diffusion peut être réalisée en interne par l’éditeur ou sous-traitée à une structure commerciale travaillant pour plusieurs éditeurs, les structures de diffusion les plus importantes appartenant généralement à des groupes d’édition.
La distribution
La distribution du livre regroupe l’ensemble des tâches liées à la circulation physique des livres (stockage, transport…) et à la gestion des flux entre l’éditeur ou son diffuseur et le détaillant : traitement des commandes, facturation, recouvrement, traitement des retours…
L’activité de distribution est sans conteste la plus industrialisée de la chaîne du livre, ce qui explique d’ailleurs qu’elle soit également la plus concentrée, la plupart des structures de distribution appartenant aux grands groupes d’édition. On estime ainsi que dix distributeurs seulement assurent les flux physiques et financiers de 90 % de la production éditoriale totale.
Si la majeure partie des éditeurs délègue les opérations de diffusion et de distribution à des structures spécialisées dans ces activités, qui sont parfois leurs propres filiales, certains éditeurs, le plus souvent de taille modeste, choisissent – ou sont dans l’obligation, faute de trouver un prestataire – d’assurer eux-mêmes l’activité de diffusion, voire celle de distribution.
LES DÉTAILLANTS
Le nombre total de lieux de vente du livre se situe en France autour de 20 000 à 25 000. Sur ce total, 15 000 de ces points de vente ont une activité véritablement régulière de vente de livres et seuls 3 500 à 4 500 d’entre eux exercent cette activité à titre principal ou réalisent une part significative de leur chiffre d’affaires avec le livre.
Le premier niveau de vente (librairies importantes, grandes surfaces culturelles, grands magasins, etc.) représente aujourd’hui près de la moitié des achats de livres des particuliers.
Si la part des ventes de livres réalisées sur internet a eu tendance à augmenter ces dernières années (21 % en 2018), les librairies demeurent, pour la grande majorité des secteurs éditoriaux (littérature, jeunesse, sciences humaines, etc.), le premier canal de vente de livres (22 %), devant les grandes surfaces non spécialisées (19 %), et non loin des grandes surfaces spécialisées (25,5 %).
LES PRATIQUES D’ACHAT, DE LECTURE ET DE PRÊT
En 2018, 51 % des Français de 15 ans et plus ont acheté au moins un livre imprimé au cours de l’année (-1 % par rapport à 2017). Les acheteurs occasionnels (1 à 4 livres par an) représentent 23 % (-1 %) des acheteurs de livres, les acheteurs moyens (5 à 11 livres par an) 15 % (-1 %), et les gros acheteurs (12 livres et plus par an) 12 %. Cette dernière catégorie, qui était en recul depuis plusieurs années, a gagné 1 % en 2018. Plus d’un acheteur de livres sur 10 (12 %) a acquis au moins un livre d’occasion en 2018 (+0,5 % par rapport à 2017).
Selon une étude publiée en 2019, 91 % des Français de 15 ans et plus ont lu au moins un livre au cours de l’année. Au cours de cette même année, 26 % d’entre eux ont lu de 1 à 4 livres, 40 % de 5 à 19 livres et 25 % ont lu plus de 20 livres.
Le nombre de livres prêtés en bibliothèques municipales était de 279,5 millions en 2016 et de 846 000 en bibliothèques universitaires en 2017. Les achats de livres par les bibliothèques municipales représentent chaque année environ 8,4 millions de volumes, et 846 millions en bibliothèques universitaires.
L’ÉDITION NUMÉRIQUE
En 2017, le marché de l’édition numérique, tous supports et toutes catégories éditoriales confondus, a généré un chiffre d’affaires de 201,70 M€, en progression de 9,8 % par rapport à 2016.
Le poids de l’édition professionnelle et universitaire est prépondérant au sein du marché du livre numérique et représente 75 % du total des ventes en valeur (150,5 millions d’euros).
Le chiffre d’affaires des ventes de livres numériques de littérature est de 25,4 millions d’euros en 2017, soit 13 % du total des ventes numériques.
L’édition numérique grand public (hors littérature) a généré, en 2017, un chiffre d’affaires de 17,3 millions d’euros et représente 8 % du total des ventes de livres numériques.
Quant à l’édition scolaire numérique, elle représente 4 % des ventes en valeur, pour un montant de 8,4 millions d’euros.
La part de l’édition numérique sur support physique (CD, DVD, clé USB) dans le total des ventes numériques est de 4,8 %. Les deux principaux modes de commercialisation des livres numériques sont les ventes de livres numériques à l’unité (qu’il s’agisse de téléchargement ou de streaming) et les ventes d’abonnements et de licences d’utilisation de contenus.
1.Les chiffres cités dans ce chapitre sont extraits des « Chiffres clés 2017-2018 du secteur du livre » (ministère de la Culture, service du Livre et de la Lecture, Observatoire de l’économie du livre), des « Chiffres de l’édition 2017-2018 » (rapport statistique du Syndicat national de l’édition), du baromètre SOFIA/SGDL/ SNE des usages numériques 2019 et de l’étude « La situation économique et sociale des auteurs du livre » (ministère de la Culture/CNL, 2015).