Présentée par Michaël Cronin
Je remercie la Société des Gens de lettres de son invitation. Je suis ravi d’être ici, dans cette belle bâtisse, et j’espère contribuer à ma façon à vos discussions sur la traduction littéraire.
Je veux commencer par un avertissement qui vient de mon compatriote James Joyce, Dans un petit texte en français intitulé Le chat et le diable qu’il a écrit pour son petit-fils Steven, il raconte comment les habitants de Beaugency-sur-Loire ont roulé le diable pour lui faire construire un pont en pierre. Le diable est furieux de ne pas être parvenu à récupérer les âmes des habitants et, dans une sorte de petit post-scriptum, James Joyce écrit que quand le diable est en colère, il parle une langue qui s’appelle le «bellsybabble». Qu’est donc ce bellsybabble? Le français parlé avec un très fort accent dublinois… Aussi, si vous avez parfois l’impression que ce que vous entendez ressemble davantage au bellsybabble qu’au français, vous penserez à James Joyce.
Plus sérieusement, je souhaite ce matin situer la question de la traduction littéraire et du statut des traducteurs littéraires au regard d’un certain nombre d’enjeux très importants pour leur avenir non seulement en France mais aussi en Europe et dans le monde. J’évoquerai donc cinq défis pour l’avenir de la traduction littéraire : le défi de l’Europe institutionnelle et de ses structures ; le défi de société ; le défi de l’informatique ; le défi éducatif – non pas au sens de la formation des traducteurs, dont on a beaucoup parlé, mais plutôt de la place de la traduction dans le système éducatif ; le défi des médias.
En 2004, alors que l’Irlande exerçait la présidence de l’Union européenne, le gouvernement m’a demandé de rédiger un texte sur la façon d’utiliser la littérature pour promouvoir la diversité au sein de l’Union. Le brief, comme on dit en anglais, était donc plutôt vague mais j’ai fait de mon mieux pour essayer de concrétiser cette notion.
J’avais été frappé, et cela perdure, par le grand écart entre d’une part l’intégration de l’Europe économique – on voit actuellement tous les problèmes qui en résultent –, voire de l’Europe sociale que l’on voit parfois comme une sorte de contrepoids à cette intégration économique, d’autre part la gestion culturelle de l’Europe. Or, si l’on parle souvent du déficit démocratique, on évoque trop rarement le déficit culturel. On a donc d’un côté une intégration économique qui avance à grands pas et de l’autre des programmes européens très modestes dans le domaine de la culture, à tel point que l’on peut se demander si la question fondamentale de l’intercompréhension culturelle et d’une vision partagée fait véritablement partie du projet européen. Autrement dit, le projet européen peut-il avoir un sens s’il est uniquement fondé sur une vision strictement économique et commerciale, donc réductrice ? J’y reviendrai lorsque je traiterai du défi de société, mais je pense qu’une bonne partie de la méfiance à l’égard du projet européen tient à cette carence absolue dans le domaine culturel.
Dans son ouvrage paru début 2011, Faut-il penser autrement l’histoire du monde?, le géohistorien français Christian Grataloup s’efforce de décloisonner les histoires nationales, de montrer toute l’importance des mouvements transnationaux dans la construction et l’élaboration des cultures et de mondialiser notre conception de l’histoire. Ainsi, si l’on dit fréquemment que la Renaissance a débuté au XVe siècle, il y a eu en fait plusieurs renaissances, aux XIIe, XIIIe, XIVe et XVe siècles, dans différentes parties du monde. Il est dit à la fin du livre que le monde affronte actuellement un grand problème conceptuel et culturel : si l’intégration des espaces économiques mondiaux est très rapide, on en est encore à la case départ en matière d’intercompréhension culturelle, fort peu de programmes s’efforçant de développer la communication et la compréhension interculturelles.
C’est pour moi à ce niveau que les traducteurs littéraires peuvent jouer un rôle primordial. En fait, traducteurs et traductrices occupent une place très ambiguë. Ils ont en premier lieu une fonction identitaire, ce sont eux qui sont à l’origine de l’enrichissement lexical, du développement syntaxique et des apports culturels qui ont forgé les langues. Ils contribuent à l’élaboration de toutes les langues nationales : anglais, estonien, lituanien, gaélique, français, allemand à l’époque de Luther, etc. Dans l’histoire de la traduction, la présence des traducteurs est frappante dans la construction identitaire des langues émergentes au XIXe siècle. Mais ils ont aussi pour fonction, par définition, l’ouverture sur le monde extérieur : ils regardent ailleurs pour trouver des écrits, des idées, des langues qui sont absents chez eux.
C’est pour cela que le traducteur est très souvent vu comme un « agent double » qu’il vaut mieux ne pas trop fréquenter : certes, il parle votre langue « comme vous et moi », mais il en parle d’autres tout aussi bien… Il est absolument indispensable à la constitution de la culture nationale, sans qui la culture élisabéthaine au XVIe siècle, l’Allemagne à l’heure romantique, la France à l’âge classique seraient impensables. Mais il jouit aussi d’une véritable ouverture sur le monde. Son rôle est absolument indispensable dans la construction des identités comme dans leur ouverture sur autre chose, dans la notion non pas d’indépendance mais d’interdépendance. C’est précisément pourquoi la traduction littéraire doit jouer un rôle fondamental pour combler les déficits culturels.
J’en viens au défi de société. Un sociologue anglais d’origine antillaise, Stuart Hall, a parlé de « cosmopolitisme vernaculaire » pour décrire nombre de sociétés actuelles. Jadis, on pensait que l’exotique, l’étrange, l’altérité radicale se situaient ailleurs et qu’il fallait se déplacer pour les rencontrer. Désormais, on les trouve à côté de chez soi, en faisant ses courses, au pub le soir : la différence culturelle et linguistique radicale est parmi nous.
Les flux migratoires entraînent une extrême complexification linguistique de l’Europe. Penser la traduction littéraire dans un cadre européen signifie donc que l’on pense à des langues comme l’hindou, le bengali, le tagalog, le vietnamien. Avec cette complexification linguistique, la notion de traduction littéraire est bien différente de ce qu’elle était il y a une trentaine d’années.
Il s’agit pour moi d’un défi car tout ceci est lié à un autre enjeu, celui de la crise du multiculturalisme en Europe. On en a eu une illustration tragique et sanglante en Norvège et on en parle beaucoup aux Pays-Bas, au Danemark, en Suisse, en France, en Irlande, au Royaume-Uni et ailleurs : partant de l’idée que l’Europe a beaucoup œuvré, mais en vain, dans la reconnaissance des identités culturelles et linguistiques, certains prônent des politiques forcenées d’intégration culturelle et linguistique.
Au Royaume-Uni, la traduction est fréquemment perçue comme propice au multiculturalisme supposé miner l’identité et la nature de la société. La situation est encore plus compliquée car si la discrimination reposait auparavant sur la différence de couleur de peau, la différence a ensuite été culturalisée. Ainsi, le rejet de l’autre ne tient plus à la couleur de sa peau mais au fait que l’on n’aime ni le goût ni l’odeur de ce qu’il mange, que l’on est un peu effrayé par le son de sa langue et par l’étrangeté de ses écrits, que l’on ignore de quoi il parle quand il s’entretient avec ses amis dans une langue étrange. Dans le différencialisme culturaliste, la différence est de nature culturelle et, pour cela, plus acceptable.
La traduction littéraire – c’est un des points forts de cette activité mais aussi un de ses paradoxes – opère une sorte de mise en cause de cette conceptualisation identitaire de la culture, qui enferme les gens dans des formes de ghettos tout en rejetant la notion de ghetto. En fait, quand on regarde l’évolution, en particulier démographique, de nos sociétés, on voit que les flux migratoires vont perdurer et entraîner la redéfinition de nos sociétés elles-mêmes. Les traducteurs et la traduction littéraires me paraissent aussi amenés à jouer un rôle très important dans cette redéfinition et dans les débats sur « la crise du multiculturalisme en Europe ».
Le troisième défi est celui de l’informatique. Je ne l’entends pas, comme tant de médias, au sens de l’avenir de l’écrit, du livre confronté aux liseuses numériques : ces débats me paraissent un peu stériles car dans les phénomènes culturels les formes sont davantage complémentaires qu’elles ne s’éliminent l’une l’autre. Je parle plutôt de l’impact de l’informatique sur les traducteurs littéraires du point de vue d’une part du mode de lecture, d’autre part de la bidirectionnalité de l’internet.
S’agissant du mode de lecture, des chercheurs allemands ont publié l’an dernier un rapport qui montre les différences entre la lecture d’une page sur papier et à l’écran. Avec une caméra qui enregistre le mouvement des yeux, ils se sont aperçus qu’à l’écran, dans ce que l’on appelle l’approche F, on lit la première ligne, on descend, on lit une ligne au milieu puis on va en bas de page et on passe à la page suivante. Ils ont également constaté que l’on consacre environ une quinzaine de secondes à la lecture d’une page qui apparaît sur l’écran.
Un cabinet d’études israélien a conduit des études sur des personnes qui se rendent sur les sites de grandes sociétés. Elles passent en moyenne entre 15 et 27 secondes à lire la page à l’écran, cette durée varient en fonction de la nationalité : 16 secondes pour les Canadiens, 19 pour les Anglais, 22 pour les Français, 26 pour les Allemands. Ce qui est intéressant c’est que le mode de lecture est très variable et que, pour la traduction pragmatique – expression un peu malheureuse qui recouvre toute la traduction scientifique, commerciale et administrative – l’acceptabilité des textes change. Parce qu’on les lit très vite, on accepte de lire des textes plus ou moins bien traduits. Avec la vitesse de la lecture s’instaure une différence dans la perception des textes comme dans les critères de qualité de la traduction. En fait, la question pour l’avenir de la traduction littéraire, surtout à l’heure des textes très courts de type flash fiction faits pour être lus très vite, est de savoir si ces nouveaux modes de lecture vont entraîner une redéfinition des paramètres de qualité pour la traduction littéraire.
Le deuxième aspect est celui de la bidirectionnalité. Certains ici se souviennent sans doute des débuts de l’internet, quand on se contentait de lire le texte à l’écran comme dans un livre. Aujourd’hui, avec le 2.0 et le web sémantique, on dispose d’une possibilité d’interaction, qu’illustrent parfaitement les médias conviviaux, les social media, comme Facebook.
Cela a pour effet le phénomène de la « wikitraduction », qui consiste en une traduction collaborative, par des groupes de traducteurs, par exemple en mettant des sous-titres aux feuilletons coréens très prisés aux États-Unis. C’est un travail interactif : une première personne rédige le sous-titre et une seconde porte ses corrections, parfois accompagnées de commentaires désobligeants. Lorsque le troisième Harry Potter est sorti en anglais des groupes de traducteurs allemands ont aussitôt utilisé la wikitraduction. Peut-être faut-il la voir comme une belle occasion de diffuser la traduction littéraire, comme une forme de traduction citoyenne qui permet aux langues de survivre. Dans le cas d’une langue minoritaire menacée de disparition comme le gaélique, la wikitraduction permet-elle de toucher un maximum d’irlandophones dans le monde ou fait-elle courir le risque d’une traduction littéraire à bon marché et de piètre qualité ?
Pour moi, cette question est liée à celle de la chronodiversité. On a beaucoup parlé ces trente dernières années de l’importance de la biodiversité et de la nécessité de protéger les animaux et les plantes en voie de disparition ; on a aussi traité de la géodiversité et de la protection des paysages ; mais je crois que l’on n’a pas suffisamment parlé de cette chronodiversité. À la belle époque où l’on s’envoyait des lettres, on avait environ une semaine pour répondre – deux jours dans le cas où cela concernait une demande d’argent. Avec l’invention de la télécopie, ce délai est tombé à un jour ou deux. Désormais, on vous relance si vous ne répondez pas dans les deux ou trois heures à un courriel. Avec les textos, c’est une question de minutes voire de secondes avant que vous ne vous attiriez la fameuse question existentielle « where are you ? »…
À propos de la rapidité de réponse, le philosophe italien Giorgio Agamben parle de « dispositif », c’est-à-dire de ce qui fait que l’on est dominé par le temps instantané de l’informatique, qui conduit à se comporter d’une certaine manière. On voit aussi cela dans ce que l’on appelle chez nous la « société 24/7 », c’est-à-dire où les magasins sont ouverts 24 heures sur 24 et sept jours sur sept, ce qui entraîne la disparition de la notion sacrale d’un temps qui peut être voué à autre chose que consommer, produire, etc. Pour ma part, il me semble humainement impossible de ne pas reconnaître l’existence de différents types de temps.
Ainsi la traduction littéraire est souvent un travail long et chronophage. La formation d’un traducteur est aussi une œuvre de longue haleine car elle suppose des années et des années d’apprentissage. Là comme ailleurs, un des défis des politiques culturelles et éducatives est de reconnaître la chronodiversité de nos existences : certaines activités exigent une autre conception du temps que celle des technologies de communication rapide.
J’ai évoqué brièvement la formation et j’en viens à mon quatrième défi, celui de l’éducation au sens non pas de la formation de traducteurs, dont je m’occupe à Dublin, mais de celle du public de la traduction littéraire, de ceux qui vont la lire.
L’étude de la langue nationale, que ce soit le gaélique, l’anglais, le français, l’allemand, etc. est obligatoire dans tous les pays. J’ai mené il y a trois ans une étude sur les livres qui sont au programme dans ce cadre et, bien qu’elles aient marqué ces langues de manière tout à fait fondamentale, j’ai constaté que les traductions en sont presque totalement absentes…
Comment passer sous silence le fait que, dans les pays anglo-saxons, la traduction au XVIe siècle des Métamorphoses d’Ovide, en particulier celle qu’en a faite Golding en 1567, a été absolument fondamentale pour l’évolution de la littérature et de la langue anglaise ? De nombreuses pièces de Shakespeare sont tout simplement impensables sans cette traduction qu’il a dû lire et relire quand il écrivait. De nombreux autres dramaturges et poètes ont été influencés d’une manière fondamentale par le travail de Golding. De même D.H Lawrence disait que la traduction de Madame Bovary de Flaubert par la fille de Karl Marx, Eleanor, était « sa bible ». Ce travail a eu une énorme influence sur l’évolution du roman anglais au XXe siècle. Quant à la poésie anglo-américaine contemporaine, elle serait tout simplement impensable sans l’apport des traductions d’Ezra Pound.
Pour autant, que ce soit au lycée ou à l’université, les programmes ne font aucune part à l’étude des traductions de Golding, d’Eleanor Marx et d’Ezra Pound ! Je pourrais prendre des exemples dans d’autres pays, mais je veux surtout montrer que notre communauté de traducteurs littéraires doit relever ce défi éducatif pour mettre fin à ce cloisonnement des programmes.
Peut-être cette exclusion des traductions est-elle destinée à « nationaliser » les programmes scolaires et la langue, mais cela n’a aucun sens au regard de la part que les traductions littéraires ont prise dans l’évolution des langues et des cultures.
Dans son très beau livre, La légende des anges, Michel Serres montre que, dans la Bible comme dans d’autres récits, les anges apportent les messages puis s’effacent. Et il voit les messagers des temps modernes comme des anges déchus : non seulement ils ne s’effacent pas mais on les voit même à longueur de journée. Parce qu’ils reviennent sans cesse à la télévision et dans les médias ils occupent finalement une place plus importante que les messages qu’ils délivrent.
Ne tombons toutefois pas dans l’angélisme dans la critique de ces anges déchus car les messagers et tout ce qui a trait à la médiation sont en fait très importants pour la traduction littéraire. Travaillant il y a quelques années sur la littérature dans le contexte européen, j’avais constaté que les éditeurs avaient fait leur travail de publication des livres et les traducteurs leur très beau travail de traduction mais que souvent les livres n’arrivaient nulle part parce que personne dans les médias et dans la presse n’assurait la transmission aux lecteurs de la bonne parole traductive. Il manquait donc des médiateurs pour jeter un pont entre la littérature traduite et le public dans cette langue. J’avais alors proposé que la Commission européenne attribue des bourses afin de permettre à des journalistes littéraires de se rendre dans les différents États membres pour une période assez longue pour y perfectionner leurs connaissances des langues et des littératures et pour qu’ils puissent ainsi jouer ce rôle de médiateurs. Car à côté du travail d’édition et de traduction, celui de médiation me paraît également fondamental : tout comme la théologie chrétienne, il nous faut absolument faire avec les anges déchus. À défaut, l’avenir me paraît un peu sombre.
Je reviens à la Tour de BaBulles. Cette image me vient en fait d’un dramaturge lituanien, Albertas Vidžiūnas. Dans une émission de radio aux côtés de l’écrivain de langue gaélique de Belfast, Gearóid Mac Lochlainn, il traitait du moment de l’histoire de la Lituanie où le lituanien avait été interdit par les Russes et où le simple fait de posséder des écrits dans cette langue était un délit. Tout un système de passeurs de livres avait alors été élaboré, qui faisaient passer des écrits depuis la Suède et d’autres pays. Ces booksmugglers ou passeurs de livres étaient donc très importants pour la survie de la langue lituanienne. Au cours de cette émission, Vidžiūnas a utilisé l’image « tower of bubbles » que j’ai essayé de traduire par Tour de BaBulles. Très sensible à ces questions, comme son confrère irlandais et comme quiconque parle une langue minoritaire, il expliquait que les langues et les cultures sont des sortes de bulles très fragiles dans un monde où une langue meurt chaque mois et où, d’ici la fin du siècle, on aura perdu 90 % de nos langues. Le seul moyen qu’une langue survive est donc qu’elle se fonde dans une autre. Mais on peut aussi avoir de la Tour de BaBulles une vision plus pessimiste : la bulle dans laquelle la langue se fond devient de plus en plus grosse et engloutit toutes les langues. Je désigne cette absorption sous le nom de « syndrome du patient anglais »…
Ce que j’aime beaucoup dans l’image de Vidžiūnas, c’est qu’elle met en évidence toute l’importance de la sauvegarde de la diversité, de la reconnaissance de la grande fragilité de nos cultures et de nos langues, mais en même temps la nécessité d’une ouverture sur l’extérieur, sur l’autre, qui va au-delà des seuls traducteurs littéraires. Car, quand on parle de la traduction littéraire, il est bien sûr très important de parler des conditions de travail et du statut, mais il faut aussi situer notre travail dans un cadre plus large, plus global, afin que l’on mette en évidence toute son importance. On parle beaucoup de « l’invisibilité du traducteur », mais il serait vraiment dommage de nous rendre nous-mêmes invisibles aux autres. Je suis en effet convaincu que l’avenir de ce continent et même de ce monde dépend en grande partie des concepts, des perspectives et des outils que peuvent apporter les traducteurs littéraires.