Jean-Guy Boin, directeur général
Le Bureau International de l'édition Française est une association professionnelle (association du type Loi de 1901), c'est-à-dire à but non lucratif, qui regroupe des éditeurs (262 adhérents à ce jour). Son objet principal est la promotion de l'édition française à l'étranger et le développement d'échanges et de réseaux de professionnels du livre.
Avant de développer plus particulièrement nos actions dans la francophonie je vais rapidement rappeler qui nous sommes et nos missions.
Outre les cotisations et les frais de participations apportés par les éditeurs membres, cette association est appuyée par deux ministères français. Le principal contributeur à notre budget est le ministère de la Culture et de la Communication à travers la Direction du livre et de la lecture, et le second, le ministère des Affaires étrangères au travers de la Division de l'écrit et des médiathèques.
Nos missions sont à la fois d'ordre professionnel et d'autres d'intérêt général - en particulier sur l'échange d'expériences et la professionnalisation tels que nous souhaitons et essayons de les conduire, ce dont témoigne la conjugaison de l'appui financier de nos adhérents et des pouvoirs publics.
Cette association emploie une équipe d'une vingtaine de personnes à Paris, plus quatre à New York (où nous avons une Agence de droits vers la langue anglaise) et assure la présence collective d'éditeurs dans des foires internationales. Francfort, Londres, Bologne... Au total, nous participons à une cinquantaine de manifestations de tous ordres. Des foires comme Francfort où l'on organise la présence de 160 éditeurs et des foires beaucoup plus spécialisées comme Kalamazoo, à 200km de Chicago, où se tient chaque année le congrès international d'études médiévales. Les éditeurs de sciences humaines et d'érudition avec lesquels nous travaillons (Vrin, les PUF, ou d'autres) nous demandent d'y assurer une présence pour rencontrer des libraires ou des bibliothécaires d'universités, voire des éditeurs sur des fonds très spécialisés d'études médiévales.
On peut tout à fait imaginer qu'un éditeur décide d'être sur notre stand pour une foire particulière et dispose de son propre stand sur une autre. À Londres, par exemple, au début de ce mois de mars, les éditions du Seuil étaient sur notre stand collectif alors qu'à Francfort elles ont leur propre espace.
La France est l'un des rares pays à économie développée à disposer d'un soutien public aussi important pour remplir ces missions. Je tiens à le souligner car cela correspond à une politique ancienne. En effet ce soutien date de l'après-guerre, signe d'une volonté forte de notre État de favoriser la promotion des ouvrages quels qu'ils soient : aussi bien la littérature que le livre d'art, les méthodes de langue ou le livre scolaire que le livre de jeunesse, la poésie que le livre de philosophie. Nous travaillons pour tous les domaines de la production éditoriale française et non pas la seule littérature, celle-ci (tous domaines confondus : littérature, poésie, théâtre...) représentant un cinquième des ventes du marché français du livre. De même, ça n'aurait pas de sens de dire qu'on ne représente que le secteur jeunesse, qui lui-même forme un peu plus de 10 % des ventes, ou encore un autre domaine, Notre action s'inscrit dans tous les genres éditoriaux et pour tous types d'éditeurs.
En ce qui concerne la francophonie, et particulièrement dans les pays majoritairement francophones, nous participons à peu de foires. Pour des raisons très simples. Nous n'allons pas aux grandes foires de la francophonie du Nord - Montréal, Bruxelles et Genève -, parce que nous savons que les éditeurs français sont capables d'y exposer eux-mêmes ou par le biais de leurs distributeurs locaux. Pour les foires d'Afrique subsaharienne, leur organisation est souvent complexe et vouloir à tout prix y participer pour un coup de projecteur qui grèverait le chiffre d'affaires annuel du marché local du livre réalisé par les libraires ne correspond pas à nos objectifs.
Si l'on se réfère à la foire d'Alger, foire qui se développe depuis quelques années grâce à la mobilisation des professionnels algériens du livre, qui va se tenir cette année fin octobre, c'est à la fois très bien d'y présenter des ouvrages -le principe est de les présenter en un exemplaire (nous ne sommes pas libraires même si nous confions la gestion de ce stand à un libraire)-, et de montrer au public un éventail de la production de l'édition française, mais cela peut parfois être frustrant pour les étudiants, les bibliothécaires universitaires, qui souhaiteraient une offre plus large.
C'est moins le cas à la foire de Casablanca -le tissu de la librairie marocaine est plus ancien- dans laquelle les professionnels du livre marocains eux-mêmes s'impliquent beaucoup.
Un salon doit être une chambre d'écho vis-à-vis de tout ce qui se fait tout au long de l'année et ne doit pas être là pour s'opposer au marché annuel mais pour compléter un certain nombre de partenariats menés tout au long de l'année.
Outre les foires et salons, le BIEF produit des informations sous forme d'études comme au travers de la publication de sa Lettre, qui rend compte plus particulièrement des échanges éditoriaux. Des études qui ont pour objectif de définir la structure des marchés du livre ont été réalisées sur l'Iran, l'Afrique du Sud, le Mexique, la Chine, l'Inde, c'est-à-dire sur des pays où il ne s'agit pas d'exportation en tant que telle, mais plutôt du développement de cessions de droits. Très probablement, pour la présence internationale de l'édition française, ces cessions de droits sont une des activités qui va se développer dans ce type de pays.
Le troisième volet de l'action du BIEF, la formation et les échanges professionnels, s'organise par exemple au travers de séminaires, de rencontres, organisés à l'occasion du Salon du livre, l'an dernier avec des éditeurs et des libraires russes pour réfléchir notamment aux échanges de droits de traduction, cette année sur la francophonie, je développerai cela plus loin.
Les échanges professionnels se font en particulier en liaison avec l'OIF et l'AILF pour ce qui concerne les librairies au Maghreb, au Proche-Orient, en Afrique subsaharienne. C'est une mission appelée à se développer, à travers le monde, dans les années qui viennent. Plus on disposera de partenaires professionnels à travers le monde, plus il y aura un développement du marché qui, espérons-le, s'accompagnera d'un développement de la lecture. On ne peut pas imaginer un développement de la lecture publique, en Afrique par exemple, sans penser à un développement du marché des éditeurs ou des libraires locaux.
Nous avons surpris certains au dernier Salon du livre de Paris en décidant d'organiser des rencontres professionnelles en distinguant la francophonie dite du Nord et la francophonie dite du Sud.
Pourquoi avoir fait ce choix ? Parce que, en ce qui concerne la francophonie du Nord - c'est-à-dire la Suisse, la Belgique, le Canada, le Luxembourg et la France -, au sens économique du terme et non pas au sens politique, il existe des problématiques communes, conflictuelles parfois, mais avec des logiques économiques voisines, des proximités culturelles et pas seulement linguistiques qui rendent évident l'intérêt à travailler ensemble et développer un certain nombre de coopérations.
La francophonie du Sud, développe d'autres problématiques. Celle du pouvoir d'achat et du prix du livre vis-à-vis du pouvoir d'achat, ce qui est un vrai sujet, et celle de la professionnalisation des acteurs de la diffusion et de la production du livre. Notre rôle est également d'aider, de favoriser l'émergence de ces professionnels, d'un réseau d'éditeurs locaux dans le sud, pour créer ensuite ces coopérations avec des éditeurs français.
Ce n'est pas facile d'identifier ces éditeurs parce qu'ils ont des difficultés de distribution, de transmission de l'information. Les identifier et faire en sorte qu'il y ait des relations qui se créent et se développent avec les éditeurs français, fait partie de nos missions.
Au-delà de l'aspect logistique des salons, au-delà des études, des formations et des échanges professionnels, le BIEF existe pour développer et faciliter la constitution d'un vrai réseau professionnel qui, pour des raisons diverses, n'ont pas forcément l'occasion de savoir qu'ils peuvent se rencontrer ici ou là.
En résumé, le BIEF développe à la fois des missions de service à ses adhérents et des missions plus relationnelles, de constitution, de développement d'un réseau de partenaires professionnels de l'édition française.