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Christian Roblin, directeur de la SOFIA (Société Française des Intérêts des Auteurs de l'écrit)

Avant d'évoquer la Sofia et les droits que nous gérons, je crois qu'il est utile de se figurer le contexte économique si particulier dans lequel évolue l'édition. Et, pour ce faire, je brosserai, à grands traits, quelques situations éclairantes.

Tout d'abord, il n'y a pas beaucoup d'autres arts ou de types d'expression qui produisent, en France, 56.000 nouveautés par an. C'est le cas du livre. Il n'y en a pas beaucoup qui permettent à tout le monde, pratiquement sur tout le territoire, de trouver en quelques jours une oeuvre parmi un million d'articles demeurés disponibles au fil des années. C'est le cas du livre, il y a un million de titres disponibles.

Cette singularité, d'abord, culturelle, constitue, bien entendu, par son ampleur, une singularité économique et c'est à la fois la marque d'une extraordinaire présence et celle d'une extraordinaire fragilité, puisque chaque titre ne peut évidemment pas atteindre à la rentabilité.

Pour mettre en valeur le paradoxe de l'économie du livre, j'userai d'une comparaison avec l'économie du vin. Un bon vigneron conserve son vin pendant plusieurs années : plus il le garde longtemps, plus il espère lui voir prendre de la valeur. Dans certains vignobles, il n'est pas rare de stocker la production au moins trois ans.

C'est aussi vrai pour l'éditeur : il est fréquent qu'il « tire à trois ans », mais, au bout de trois mois, ce qui est à peu près la durée de vie moyenne d'un livre juste après sa sortie en librairie, le livre disparaît très vite des rayons, le stock perd ainsi beaucoup de sa valeur, surtout qu'il est affecté par les retours, cette faculté si spéciale dont dispose en général le libraire. Certains auraient même aujourd'hui tendance à réduire cette durée à trois semaines... pour les livres mis en rayon, c'est à-dire ceux qui sont sortis des cartons, ce qui n'est pas toujours le cas, quand le procédé de l'office est utilisé ! Bref, on s'accordera à considérer que les cycles d'exploitation des livres se sont globalement raccourcis chez les libraires, et ce sous l'effet conjugué de l'accroissement de l'offre, du déploiement des outils de gestion informatique et de la pression des banques. Il est aussi vrai que, dans ce contexte, l'éditeur s'est mis stocker pour une durée moindre, mais toujours considérable par rapport au rythme des réassorts ou des commandes unitaires, rythme qui s'est lui-même beaucoup ralenti, à cause de la « dictature des nouveautés » et de la constitution de moins en moins fréquente d'un fonds par le libraire. Donc, on peut en conclure que l'économie du livre est de plus en plus compliquée. Et encore nous négligerons ici les questions relatives à l'évolution des réseaux de ventes et des comportements des acheteurs, ce qui nous entraînerait beaucoup trop loin.

L'autre différence majeure d'avec l'économie du vin tient à cette catégorie originaire de producteurs de livres que forment les auteurs. Être auteur est vraiment particulier : ce créateur de richesses produit, si je puis dire, l'essentiel de la valeur perçue de l'ouvrage (je ne dis pas de la valeur ajoutée : la chaîne de la valeur du livre comporte beaucoup de maillons, d'amont en aval), mais on ne peut nier que l'oeuvre de l'esprit a, d'abord, été portée par l'auteur avant de l'être par le livre, avec une nuance de sens aussi importante que celle qu'il y a entre « avoir été portée par sa mère » et « être porté par une nacelle » (on me dira que je file ici une métaphore de ballon et, pour peu qu'il soit rouge ou blanc, ce n'est pas non plus sans rapport avec le vin....). C'est donc un truisme d'observer que l'auteur présente un caractère primordial dans cette activité. Or cet auteur est la plupart du temps un « amateur » par rapport aux professionnels que sont tous les autres partenaires de la chaîne du livre, c'est-à-dire que ce n'est pas son activité principale et, qu'en général, il ne vit pas des revenus que lui procure l'écriture. L'imprimeur, l'éditeur, le libraire, tous, quant à eux, vivent de l'édition, et ainsi de suite. Et il se trouve, ainsi - ce qui est remarquable par rapport aux autres secteurs économiques -, que l'un des protagonistes principaux du livre est un amateur par rapport à l'ensemble de la chaîne des industriels ou des commerçants impliqués par le commerce du livre.
Paradoxalement, s'il est un amateur, on pourrait penser qu'il est payé à la tâche et disparaît de l'affaire, comme d'ailleurs bon nombre de prestataires techniques, l'imprimeur, par exemple. Eh bien, ce n'est pas du tout ce qui se passe. L'auteur, cet « amateur » (toujours par rapport aux « professionnels » du livre), prend le risque industriel avec l'éditeur. Donc, il est payé en fonction du succès de son livre. Qui plus est, l'éditeur peut espérer compenser son infortune, sur un titre, par de bonnes ventes, sur un autre. L'auteur, lui, ne court, en général, qu'une chance à la fois : la sienne seule. Et c'est le propre de l'édition de reposer et de ne pouvoir reposer que sur un modèle de cette nature, sans quoi bien peu de livres paraîtraient. Il n'est, d'ailleurs, pas malsain, si l'on y songe, que l'activité des auteurs soit, en partie, régulée par le succès commercial de leurs oeuvres. D'autres activités artistiques partagent avec le livre certains traits caractéristiques de son économie, mais jamais à ce point, me semble-t-il.

En effet, au delà de la situation particulière de l'auteur dont on perçoit la fragilité du statut (je vais y revenir), on a pu mesurer combien le livre est, dans toutes ses dimensions, une activité fragile, ne serait-ce qu'en raison du nombre total des ouvrages disponibles et du nombre annuel des nouveautés, comme de l'accessibilité sur le territoire de cette très grande multitude d'oeuvres, le tout contribuant bien entendu à l'expression et à la diffusion d'une très large diversité culturelle. C'est aussi la chance du livre car, en comparaison, la peinture contemporaine, par exemple, ne se met pas, d'une manière aussi immédiate, à la portée de son public. Il y a, d'ailleurs, d'autres raisons, qui ne sont pas que financières, mais qui touchent également à l'absence de formation artistique de la population - l'apprentissage de la langue, qui est le premier bien commun, passant par la fréquentation d'un certain nombre d'oeuvres (ou de morceaux choisis) fait du livre un moyen naturel de la découverte du monde et de soi-même.

Si l'on veut bien y revenir sous l'angle du droit, on peut dire que le livre, cette activité fragile, est encadrée par un droit récent : la propriété littéraire, droit qui a connu son essor au milieu du XIXe siècle et qui est déjà fragilisé par les assauts de la gratuité, d'aucuns voulant réduire la durée de la protection ou disposer gratuitement des contenus, etc. On veut bien payer son bifteck mais pas son livre. On trouve légitime de protéger le dessin d'une montre, mais pas une oeuvre de l'esprit ! Il y a donc aussi une fragilité du droit d'auteur. Tout l'univers du livre est ainsi constitué de réalités fragiles, ce qui fait que tout devient une conquête permanente, à la manière des digues qu'il faut constamment consolider en bordure d'océan, la meilleure digue étant, d'ailleurs, la conscience collective qu'il s'agit là d'un des fondements de notre identité et qu'il nous appartient à tous d'en assurer la pérennité par un jeu de conditions juridiques et économiques équilibrées. Ce n'est pas d'aujourd'hui : une loi qui date de 1981 y a déjà fortement contribué, une loi souvent jugée iconoclaste à l'étranger et pourtant si précieuse, la loi sur le prix unique du livre. Oui ! il faut défendre la singularité du livre car la singularité de sa situation est fortement attachée à la singularité même de chaque livre.

Et c'est pour cela qu'il a paru utile, aussi bien aux auteurs qu'aux éditeurs, de s'associer au sein de la Sofia, avec deux objectifs principaux sous-tendus par un impératif permanent. L'impératif, c'est de conduire constamment un effort de compréhension mutuelle, en vue d'élaborer des positions communes dans un monde où l'écrit est menacé comme activité de création s'autofinançant. Et je crois que l'on peut dire que, depuis son origine, en 1999-2000, date de la fondation de la Sofia, auteurs et éditeurs ont fait du chemin ensemble et n'ont cessé de conjuguer leurs approches au service du Livre et de la lecture. Quant aux objectifs, ils sont au moins de deux ordres, au demeurant complémentaires : défendre les intérêts de l'écrit quand il se présente, comme objet physique, sous la forme d'un livre, et préparer ensemble les mutations et les adaptations aussi bien des contenus que des marchés quand le livre est dématérialisé et peut être soumis à des formes d'exploitation électronique avec tous les usages dérivés que peuvent connaître des données numérisées.

Je crois que cette conscience commune est capitale aujourd'hui, c'est très important de protéger les oeuvres de l'esprit. Il y a un mirage de la gratuité. Il y a un mythe de l'Internet. La création ne saurait se confondre avec le brouhaha de l'Internet qui fonctionne sans exigence particulière et dans le tumulte des appétits individuels. Loin de moi l'idée que la formidable libération d'énergies et de désirs que l'Internet a provoquée et continue d'offrir constituerait un épiphénomène. Si l'on y ajoute cette somme infinie de services et d'informations que l'on peut y trouver, c'est indiscutablement une révolution de la même ampleur que l'invention de l'imprimerie et c'est une bonne chose au plan des libertés publiques. Mais, il est curieux d'observer que la gratuité en vogue sur l'Internet ne concerne ni les fournisseurs d'accès ni les moteurs de recherche ni les fabricants de matériels ni les éditeurs de logiciels qui définissent tous des modèles économiques profitables, sans lesquels ils n'auraient pu atteindre les formidables valorisations qu'ils ont obtenues en bourse en quelques années. Les auteurs et les éditeurs le disent avec les autres créateurs et producteurs : il est aussi important de pouvoir préserver un espace d'expression et de création culturelles. Il faut conserver une capacité économique et sociale à produire des oeuvres de qualité et de toute nature. Donc il faut les financer et les rémunérer. Je dis cela très simplement, en mettant en garde contre cette démagogie du foisonnement spontané qui n'offrirait bientôt plus d'autre issue que de se noyer dans un brouillard de sons, de mots et d'images. Le livre doit demeurer un point de repère de la création et offrir le plus large choix possible d'oeuvres ayant une valeur suffisante pour mériter un prix. Et il convient que ceux qui y investissent leur talent et leur argent, souvent les deux, puissent continuer de le faire, sans devoir y renoncer parce qu'on les aura privé des fruits légitimes de leurs efforts. Il faut donc soutenir la création et l'objet de la Sofia est de soutenir la création dans un monde où le droit d'auteur, économiquement marginal, serait volontiers condamné à devenir, si je puis dire, « économiquement faible ». Aujourd'hui contesté par les industriels des tuyaux comme par les usagers d'Internet, le droit d'auteur appelle de puissants soutiens de la part des pouvoirs publics. C'est un enjeu politique dont on ne mesure pas toujours l'importance, parce qu'il ne peut pas s'apprécier à raison de son seul poids économique. Il est d'autant plus nécessaire de se mobiliser et de s'unir pour défendre le droit d'auteur. Et c'est au moment même où il apparaît plus menacé que jamais que s'affirment de nouveaux droits - les deux nouveaux droits dont je vais vous entretenir aujourd'hui : le droit de prêt et la rémunération pour copie privée numérique.

Le droit de prêt, tel qu'il a été conçu, sert à beaucoup de choses. La loi elle-même - souvent les lois paraissent compliquées en regard de leur utilité - eh bien, cette loi du 18 juin 2003 est, certes, un peu compliquée, mais le législateur s'est vraiment efforcé de la rendre utile à plusieurs catégories d'acteurs. Utile aux auteurs et aux éditeurs, tout d'abord, mais aussi au réseau de la librairie, en permettant à des petites librairies de continuer à vivre et notamment d'accéder aux marchés publics donc à ceux des bibliothèques de prêt, alors que beaucoup de librairies en étaient évincées par les taux de remise élevés consentis par les concurrents importants du secteur. En plafonnant les taux de remise, la loi a aussi eu vocation à soutenir le commerce de la librairie sur tout le territoire.

Cette loi a aussi créé le premier régime de retraite des écrivains et des traducteurs - car, jusqu'alors, c'était la seule profession artistique à ne pas en disposer ! Et elle a institué un système d'abondement qui prend en charge, par prélèvement sur la rémunération pour droit de prêt, la moitié des cotisations des affiliés à ce nouveau régime.

Et c'est loin d'être tout. En effet, l'essentiel de la rémunération, au moins 80% des sommes à répartir, est versé à parité aux auteurs et aux éditeurs - je donnerai plus loin une idée de ce que cela devrait représenter et ce sont des montants tout à fait substantiels. Ce faisant, c'est évidemment la création littéraire ou globalement éditoriale qui est encouragée. Je disais tout à l'heure que 56.000 titres paraissent chaque année ; certes, ils ne sont pas tous achetés par des bibliothèques accueillant du public pour le prêt, mais beaucoup de livres difficiles font essentiellement l'objet d'achats publics et bénéficieront, proportionnellement à leurs ventes, d'une aide appréciable provenant de cette rémunération. De manière générale, la part de rémunération reçue chaque année par les éditeurs s'inscrira directement dans leur résultat et favorisera leur capacité d'autofinancement, de sorte qu'ils pourront prendre en compte cet élément, en acceptant plus facilement de publier certains livres. La création éditoriale sera indéniablement favorisée par le droit de prêt. De même, aux auteurs, cette rémunération apportera un confort qui peut être significatif puisqu'on peut supposer que, dans de nombreux cas, elle pourrait représenter un quart supplémentaire de revenus.

La rémunération pour prêt en bibliothèque provient, grosso modo, pour moitié d'une contribution de l'État calculée sur le nombre d'usagers inscrits en bibliothèques de prêt et, pour l'autre moitié, d'une rémunération proportionnelle perçue auprès des librairies sur les livres vendus à certaines catégories de bibliothèques précisées par un décret en date du 31 août 2004, l'appartenance à l'une des trois premières catégories déterminant une assujettissement d'office, la quatrième catégorie embrassant toutes les bibliothèques restantes à condition qu'elles satisfassent cumulativement à une série de critères. Ce sont les auteurs et les éditeurs des livres vendus à ces organismes de prêt, qui bénéficieront de la rémunération. On estime que le volume des ventes devrait représenter à peu près huit millions de livres par an, correspondant à une population d'environ huit mille auteurs qui percevront chacun une part forfaitaire par ouvrage.

Ainsi, sur un montant estimé d'à peu près 20 millions d'euros qui sera réparti par an (sans avoir à reprendre ici le détail des calculs), cela devrait représenter 2,50 € par ouvrage vendu, ce montant n'étant pas proportionnel au prix du livre, mais résultant forfaitairement du quotient de la somme à répartir par le nombre d'ouvrages vendus.

Si vous avez 2,50 € par ouvrage, 1,25 € pour l'auteur (ou à partager entre les auteurs), et 1,25 € pour l'éditeur, on peut considérer que 8 millions d'ouvrages correspondant à une population globale de 8 000 auteurs équivalent à une moyenne de 1 000 exemplaires par auteur, soit un montant de 1.250 €. Mais cette moyenne recouvre une très grande disparité de situations. Il y aura beaucoup d'auteurs qui percevront plusieurs milliers d'euros de droits de prêt. Concrètement, vous vous demandez quand auront lieu les premiers versements, parce que, c'est vrai, cela fait longtemps qu'on entend parler du droit de prêt.

Or la Sofia n'a été agréée qu'en mars 2005 et on est en train, cet automne, de monter le système informatique complexe qui permettra de le gérer de bout en bout, parce que la loi elle-même n'est pas simple à mettre en oeuvre techniquement. Les solutions à mettre en oeuvre, surtout au plan de la collecte, doivent permettre de bien définir les « cas limites » d'application, mais aussi de prendre en charge les contraintes propres à la diversité des déclarants qui sont à la fois les libraires, en mode intégral, et, d'une manière simplifiée, les bibliothèques. Il y a aussi un rattrapage à faire car la loi est entrée en vigueur le 1er août 2003, sous le bénéfice de dispositions transitoires qui exonèrent un certain nombre de marchés publics de livres jusqu'au 31 juillet 2004. Donc on doit gérer une situation assez complexe qui a nécessité la mise au point de procédures automatisées bien spécifiques.
Par ailleurs, nous sommes assujettis à verser des droits une fois les comptes clos par année. Donc il faut être sûr d'avoir réuni toutes les sommes pour pouvoir les répartir, c'est-à-dire pour procéder à la division de la rémunération globale à servir par le nombre d'ouvrages vendus et obtenir ainsi un forfait par ouvrage. La première distribution aura lieu à l'automne prochain. Pour terminer, j'insisterai vraiment sur l'incidence positive du droit de prêt en matière de création éditoriale. Comme on l'a relevé tout à l'heure, proportionnellement au volume total de leurs ventes, les auteurs et les éditeurs d'ouvrages difficiles ou à faible diffusion devraient en tirer un plus grand bénéfice car on sait très bien que les bibliothèques publiques achètent davantage ces livres-là qu'il ne s'en vend à travers le réseau de la librairie. Ils seront proportionnellement mieux soutenus que les ouvrages de très grande diffusion - ce qui est aussi un facteur favorable à l'éclosion des talents et à l'expression de la diversité culturelle. Je crois que c'est un avantage majeur du dispositif qu'il faut publiquement souligner. La loi sur le droit de prêt favorise indéniablement l'expression de la diversité culturelle et soutient aussi bien l'exercice des libertés publiques que la vie de la démocratie. Ce sont sans doute des propos un peu grandiloquents, j'en conviens. Mais il est aisé de constater que les pays où il y a peu de livres et peu de choix sont des dictatures. Alors, n'ayons pas peur de dire que la France, par l'ensemble de son dispositif de droit de prêt, a manifesté son attachement au livre comme à une valeur culturelle fondamentale. Elle dit aussi que le livre est non seulement une valeur, mais a une valeur et que cette valeur mérite rémunération dans la pluralité de ses usages. Et ce rappel est également d'importance, pour la conscience collective, à la lumière des débats que j'évoquais plus haut. C'est une position politique qui n'a pas toujours été comprise dans tous les milieux. Ce n'est pas du mercantilisme, ce n'est pas l'octroi de subsides inconsidérés, pas plus que d'éventuels moyens de survie : c'est la traduction, sous la forme concrète d'une allocation de ressources, d'une attention particulière portée à cet allié de la civilisation qu'est le livre.

Et la transition est toute trouvée avec le droit de copie privée numérique qui vient, en quelque sorte, compenser les atteintes à la protection du droit d'auteur par cette copie sauvage sur support numérique réalisée par les particuliers. Le livre n'est pas aujourd'hui le plus handicapé par ces pratiques. C'est évidemment la musique enregistrée qui est la première victime. Aussi le livre ne fait-il l'objet que d'une part très modeste des sommes perçues à ce titre. De plus, nous éprouvons encore quelques petites difficultés à la percevoir. Le droit lui-même est collecté par Sorecop sur les supports vierges auprès des fabricants et des importateurs, mais il y est conservé, faute d'accord unanime entre les sociétés d'auteurs représentant les différentes catégories d'ayants droit de l'écrit qui comporte le livre, la musique imprimée et la presse. Le problème majeur vient de la presse qui n'a pas constitué de société de gestion collective ni confié le soin de gérer la copie privée à une société existante. C'est une difficulté que l'on essaie de pallier grâce à des mécanismes d'évaluation objectifs et à des garanties partagées. Nous sommes dans un processus un peu compliqué de négociation entre toutes les sociétés collectives gérant des droits graphiques et nous allons bientôt aboutir à une solution équilibrée nous permettant de définir une clé de répartition, malgré la fâcheuse inertie de la presse qui se prolonge. C'est la Sofia qui répartira, à titre principal, la part du livre. Je ne souhaite pas en dire davantage ici mais j'ai bon espoir que, dans les trois mois qui viennent, les derniers obstacles seront enfin levés. Les conversations ne butent plus que sur des détails et les versements de Sorecop aux ayants droits du livre devraient intervenir au début de l'année prochaine, en 2006. Dès lors qu'on aura perçu les droits, on pourra les répartir, selon des règles définies par une Commission de répartition qui se prononcera notamment sur les catégories d'oeuvres copiées, au vu de résultats de sondages financés à frais communs. Les sommes en cause sont à peu près dix fois inférieures à celles du droit de prêt. C'est de l'ordre de 2 millions d'euros contre 20 millions d'euros pour le droit de prêt.

Pour finir, je voudrais vous dire que nous acceptons les adhésions, nous les voyons même d'un très bon oeil. Pour faire face sur tous les fronts à la fragilité endémique du secteur du livre, il faut que tous les acteurs du livre, aussi dispersés soient-ils, s'unissent pour défendre leurs droits et peser politiquement davantage sur les choix concernant le droit d'auteur. Je ne crois pas nécessaire d'insister ici sur l'extrême vigilance dont nous devons faire preuve. Ce ne sont pas les personnes présentes dans cette salle qu'il faut convaincre.