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Julien Kilanga Musinde, directeur de la langue française et de la diversité linguistique à l'Organisation Internationale de la Francophonie (OIF

L'OIF depuis ses origines a toujours eu pour objectif d'aider la création en soutenant les jeunes auteurs francophones. Aider l'édition d'œuvres africaines, soutenir la diffusion au sud mais aussi au nord, soutenir l'édition d'ouvrages et de revues littéraires, scientifiques et techniques sur les sujets en rapport avec le monde francophone, voilà quelques-unes de nos missions.

Pour atteindre ces objectifs, il nous a fallu parfois se transformer en éditeur, notamment dans le domaine crucial de l'édition scolaire.
En fait, tous ces efforts seraient vains sans alphabétisation des jeunes, sans création d'un environnement de l'écrit permettant aux jeunes alphabétisés d'avoir accès au livre, sans soutien à la promotion du livre, sans prise en charge de la promotion des auteurs francophones dans les pays du Nord. Cette attitude volontariste de l'OIF a été suivie par des actions précises : les mallettes pédagogiques, les centres de lecture transformés en centre de lecture et d'animation culturelle (CLAC), l'Organisation des Foires du livre en Afrique (Foire de Dakar), participation aux salons du livre de Paris, de Bruxelles, de Montréal et de Genève.

Mais toutes ces actions furent souvent contrariées par l'incohérence de certains partenaires et les jeux d'intérêts des sociétés qui ne pouvaient tenir compte de la réalité de terrain.

Le sommet de Dakar en 1989 a créé un fonds d'aide au manuel scolaire avec un budget très réduit mais qui visait l'édition à un prix modique des œuvres reconnues. Un livre à 10 francs français. Envisager le problème sous l'angle commercial ne présage pas toujours des solutions attendues. Fallait-il se tourner vers une société panafricaine de l'édition dans le domaine du livre scolaire ? Fallait-il recourir au partenariat avec les éditeurs du Nord ? La Francophonie a tenté de soutenir la fabrication du livre dès la conception, en passant par la rédaction avec l'implication des Instituts pédagogiques et des auteurs nationaux pour demander au dernier stade aux éditeurs de financer l'impression et d'assurer la diffusion et la commercialisation. Cette stratégie fut combattue par l'attitude de certains partenaires.

Par la suite, l'OIF à modifié sa politique dans le domaine du livre. Celle-ci a consisté à ne plus donner de subventions mais à aider les Etats à définir leurs politiques nationales du livre basées sur les réalités locales, à concevoir et imprimer localement des manuels pour les vendre à prix réduits, et à mobiliser les parents pour la distribution des manuels. Mais le rapport d'évaluation du «programme édition scolaire» de mai 1999, suggère que la Francophonie se limite aux activités de sensibilisation et de concertation pour le développement des politiques nationales d'édition. L'OIF a même tenté de participer au capital d'une initiative pour faire émerger au Sud les capacités éditoriales.

La Francophonie n'a pas d'avenir sans livres. Mais que faire devant cette succession d'échecs ? Cesser toute activité en ce domaine ? Ce serait se priver d'une partie essentielle de sa vocation première. Intervenir de manière ponctuelle ? Ce n'est pas non plus une solution. On a pensé renforcer les capacités des professionnels du livre en leur donnant accès à une formation pour constituer un vivier de professionnels qui aiderait progressivement à créer l'industrie du livre dans l'espace francophone. Le centre Africain de Formation à l'édition(CAFED) et à la diffusion du livre, créé en 1990, a pour mission d'assurer le perfectionnement des professionnels des métiers du livre dans les pays africains francophones. En quinze ans, le CAFED a organisé 49 activités qui ont concerné 764 participants et stagiaires appartenant à 31 pays francophones (1) . Ces sessions de formation et séminaires d'échanges ont embrassé tous les maillons de la chaîne éditoriale, de la politique éditoriale à la librairie en passant par la gestion, la fabrication ou la diffusion et la distribution du livre. En quinze ans, ce ne sont pas moins de 550 professionnels des métiers du livre qui ont eu l'occasion de plus d'un stage, de plus d'un séminaire d'échanges. Ce travail remarquable, inscrit dans la durée, parmi tant d'autres instruments et programmes majeurs, tend à doter l'Afrique francophone des ressources humaines et des capacités éditoriales susceptibles de lui permettre d'être autonomes en matière de livre, en particulier en matière de livre scolaire.
Le CAFED a ainsi réussi à construire une famille, un véritable tissu de professionnels africains du livre où tout le monde se connaît, s'entraide et s'épaule. Les actions du programme ont, en plus de Tunis, rayonné sur les capitales africaines (Niamey, Brazzaville, Kinshasa, Casablanca, Conakry ou Dakar). Les professionnels réunis par le programme ont consolidé l'édition africaine et initié une politique de coédition qui a permis de publier plus de 40 titres. La Francophonie est prête à accompagner ces efforts car le livre, cet instrument irremplaçable d'éducation, de savoir et de culture, a toujours été au centre des ses préoccupations.

C'est pourquoi, pour clarifier la situation du livre dans l'espace francophone, plusieurs études ont été réalisées, visant à identifier dans chaque pays de l'Afrique francophone, les professionnels qui agissent réellement dans les secteurs du livre (2) . Ceci est un préalable à l'enclenchement des opérations d'aide.

Forte de toutes ces considérations, notre programmation quadriennale adoptée à Antananarivo a prévu des axes précis d'action :

- Promotion du livre francophone par l'organisation des Prix.
- Appui aux promotionnels du livre par des actions de formation
- Appui aux professionnels du livre par la participation aux salons et foires du livre.
Nous restons ouverts à toutes suggestions susceptibles d'enrichir nos actions.


 (1) Voir l'annuaire des stagiaires. CAFED 1991-2005. 15e anniversaire, tunis, CAFED, 2005.
 (2) Jean-Pierre Legueré et Georges Stern, Manuel pratique d'édition pour l'Afrique francophone, suivi de Le libraire en Afrique, Tunis, CAFED, 2000.